PRODUCTION
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LA BRIQUE DE TERRE
COMPRESSÉE
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La Brique de Terre Compressée, communément appelée "BTC", est dérivée de l'adobe, l'un des tout premiers matériaux de construction utilisés par l'Homme. Elle se fabrique à partir d'argile tamisée, comprimée encore humide dans une presse mécanique. Une fois démoulée, on la met à sécher naturellement sous abri. Matériau 100 % naturel disponible en quantité à Mayotte et dans le monde entier, la terre crue présente un excellent bilan énergétique. Elle est extraite localement, ses coûts d'exploitation et les trajets de livraison sont réduits au strict minimum. La matière première peut être mélangée à de la chaux, du ciment, ou encore des fibres végétales afin de modifier certaines caractéristiques physiques des blocs. On peut ainsi augmenter leur masse volumique, renforcer leur stabilité mécanique, leur résistance, leur capacité d'accumuler la chaleur, etc. La BTC ouvre un vaste champ d'applications en gros- œuvre (montage de soubassement, de murs porteurs) et en second-œuvre (cloisonnement, remplissage d'ossature bois, moucharabieh ...).
- HISTOIRE D'UN MATÉRIAU PAS COMME LES AUTRES -
APPARITION D’UNE NOUVELLE TECHNIQUE CONSTRUCTIVE
La Brique de Terre Compressée, plus communément appelée BTC, représente une des techniques de construction en terre crue comptant parmi les plus récentes. En effet, elle n’est apparue que dans les années 50, lors d’un programme de recherche sur l’habitat rural en Colombie. La première presse manuelle de l’ingénieur Raul Ramirez, et ses 300 à 800 briques quotidiennes, a conquis le marché international par sa simplicité et sa légèreté. Après plusieurs améliorations, cette technique a pris son essor dans le cadre de programmes d’habitat économique en Afrique et en Amérique Latine. Puis, à Mayotte, dans les années 80, des équipements collectifs ainsi que 20000 logements en BTC, dont la fameuse “case SIM”, ont été réalisés par la collaboration entre l’architecte Vincent Liétar, la SIM (Société Immobilière de Mayotte) ainsi que les artisans locaux encouragés et formés par CRAterre et les Compagnons. Suite au lancement de cette filière terre sur l’île, plus d’une vingtaine de briqueteries ont été créées afin de valoriser les ressources locales tout en fournissant de l’emploi aux Mahorais en concevant une forme d’habitat respectueuse du mode de vie local et de l’écosystème de l’île.
DÉCLIN ET ARRIVÉE D'UNE ARCHITECTURE "MODERNE"
Peu de temps après, les habitants de l’île au lagon se sont
mis à rêver de modernité occidentale en ouvrant la voie à la construction en béton et en parpaing. La BTC devient alors synonyme de vétusté et est rapidement liée aux anciennes bâtisses en torchis associées à la précarité et à un mode de vie archaïque. Malgré les diverses réalisations convaincantes qui ont démontré que cette technique constructive pouvait également être affiliée à des constructions de prestige et d’ordre public (mairies, écoles, bibliothèques…), la BTC rencontre de nouveau des difficultés depuis les années 2000. En effet, les normes, mises en vigueur suite à la départementalisation du territoire mahorais, ne font qu'accroître les freins à l’usage de ce matériau. Le secteur du bâtiment a dû se résoudre à abandonner les matériaux locaux au profit de techniques conventionnelles et occidentales menés par des lobbies de la construction.
UNE FILIÈRE À REDYNAMISER
La filière de BTC représente désormais une part très faible du marché de la construction et les briqueteries encore en activité sur l’île se comptent sur les doigts d’une main. Toutefois persiste un engouement et un un soutien sans faille des maîtrises d’ouvrages, d’une partie de la population et de quelques professionnels (architectes, maçons, briquetiers, ingénieurs…)
qui continuent à l’employer et à la plébisciter. L’association Art.Terre est l’organisme majeur qui appuie cette démarche en développant des actions allant de la sensibilisation auprès du grand public à la formation de nouveaux maçons en passant par la normalisation de la BTC via l’ATEX (Appréciation Technique d’EXpérimentation) dont va notamment bénéficier le futur Lycée des Métiers du Bâtiment de Longoni. Ce dernier a pour objectif d’être la vitrine d’un vaste programme de redynamisation de la filière de BTC tout en soulignant les avantages de ce matériau face aux enjeux climatiques, humains et d’épuisement des ressources du 21ème siècle.
- PROCESSUS DE PRODUCTION DE LA BTC -
1 / EXTRACTION DE LA MATIÈRE
La terre est extraite dans une carrière dédiée à cela. Elle peut également provenir des rebus de chantiers considérés comme des déchets.
4 / MÉLANGE
La terre est malaxée au liant puis humidifiée de sorte à obtenir un mélange homogène. Cette étape est primordiale car elle définit la qualité du matériau.
7 / CONDITIONNEMENT
Cette opération a pour but de placer les BTC produites à l'abri des intempéries (pluie, vent) et du soleil.
2 / TRANSPORT DE LA MATIÈRE
La terre est acheminée jusqu'à
l'unité de production. L'idéal étant d'avoir une carrière proche du
site où sera transportée la terre.
5 / PRESSAGE
Le mélange est placée dans la presse puis, les artisans actionnent celle-ci afin de compresser la terre en resserrant les grains à l'intérieur du moule.
8 / TRANSPORT DES BTC
Il s'effectue de manière minutieuse
de sorte à ne pas endommager les BTC. Plus le chantier est proche,
plus l'acheminement est facile.
3 / TAMISAGE
Le passage au tamis et/ou au
broyeur sert à éliminer les granulats indésirables et à rendre la terre pulvérulente.
6 / CURE ET SÈCHAGE
En cure humide (1 à 2 jours) puis en cure sèche (environ 1 semaine).
9 / MISE EN OEUVRE
La pose des BTC est effectuée
par un maçon spécialisé mais
peut également être effectuée
par le producteur lui-même.
- AVANTAGES DE LA BTC -
MATÉRIAU CIRCULAIRE
Une BTC peut être réutilisée ou recyclée sans grand apport d’énergie. Son temps de vie est infini car une fois démolie, elle peut être broyée et refaçonnée en nouvelle brique.
CONFORT ET BIEN-ÊTRE
La BTC n’est pas toxique, n’émet pas de CO2 et régule naturellement l’humidité et la température de l’air de par ses qualités hygrothermiques et thermiques. Aussi, dûe à sa perméabilité à la vapeur d’eau, elle permet la migration du surplus d’humidité de l’intérieur vers l’extérieur.
RESSOURCE ABONDANTE
La terre est présente partout sous
nos pieds. De plus, utiliser des terres excavées lors de chantiers comme une ressource évite l’épuisement des carrières. Ces terres de déblai permettent de valoriser des déchets en matériaux de construction.
FAIBLE BILAN CARBONE
Une BTC est principalement constituée de terre crue qui est une ressource locale qui demande peu ou pas de transport, de cuisson ou de transformation. Ce matériau présente donc un très faible impact environnemental.
ESTHÉTIQUE
En cloison, en mur porteur, la BTC offre une richesse de formes, de motifs et de couleurs variées dans son utilisation. L’aspect naturel de la terre apporte une sensation de familiarité et de douceur visuelle et tactile.